Exposition “La Grande Bellezza, L’Art à Rome au XVIII° siècle,1700-1758” 24 juin -3 octobre 2022

ROME AU XVIIIE SIECLE : LA VILLE DE TOUS LES CONTRASTES

Au XVIIIe siècle, Rome est, après Naples, la ville la plus peuplée d’Italie : les vedute de Giovanni Paolo Panini témoignent avec vivacité de la population romaine qui s’agglutine nombreuse dans les rues et sur les places de la capitale. Pourtant, le regard perçant du Président de Brosses, observateur avisé de la Rome de 1739-1740, remarquait aussi que la ville abritait en son sein de vastes enclaves quasi désertes, occupées par des parcs, des jardins, voire des enclos cultivés ; des espaces parsemés de ruines et animés seulement par les troupeaux de chèvres et de moutons qui y paissaient en toute tranquillité. Les peintres de paysage du XVIIIe siècle, pour la plupart étrangers à l’Italie, cueillirent cette particularité de Rome dans leurs peintures et aquarelles saisies sur le motif, rendant compte d’une cité verdoyante qui conservait, au siècle des métropoles, une dimension bucolique tributaire du passé.

Un autre témoin éclairé de la Rome du XVIIIe siècle, Montesquieu, présent dans la cité papale en 1729, constate pour sa part la vitalité des échanges qui rapprochaient alors les riches collectionneurs étrangers des artistes et agents travaillant à leur procurer de prestigieux et précieux « souvenirs » de la ville. « Rome nouvelle vend pièce à pièce l’ancienne » note Montesquieu avec acuité. Pourtant, les musées d’antiques connaissaient en même temps à Rome une saison exceptionnelle : par la volonté des grands papes du XVIIIe siècle, les musées du Capitole et du Vatican enrichissaient et redéployaient leurs collections, en les ouvrant aux créateurs et aux érudits. Le conservateur du Cabinet des Médailles de la couronne de France, Jean-Jacques Barthélémy, salua « le peuple de statues » qui accueillait le visiteur dans les salles du Capitole et définit le nouveau musée en tant que « grand livre des antiquaires ».

C’est « le disparate » de Rome qui gêne parfois l’esprit rationnel du voyageur provenant du nord, et notamment de France : le Président de Brosses regrette en particulier que dans la célèbre piazza del Popolo à l’entrée de la ville « tout [soit] de palais et de cabanes ». À Rome, en effet, les demeures des grands voisinent avec celles du peuple et l’aristocratie côtoie les classes modestes comme l’univers foisonnant du clergé. La surprise guette le promeneur à chaque coin de rue et fait le charme de la ville.